Le Chili se rassemble

Ce 1er mars au Chili aurait dû être un jour de rentrée de grandes vacances.
Les gens reviendraient au travail, bronzés, reposés, se racontant les meilleures anecdotes des leurs congés au bord de la mer ou dans les parc nationaux.
Les jeunes retourneraient sur les bancs de leur collèges, lycées, écoles avec les derniers potins sur les profs, le directeur et la fille du prof de math.
La vie reprendrait avec ses embouteillages du matin, son métro bondé, son café corsé, le journal machinalement feuilleté en attendant le bus ou la prermière réunion de synthèse de l'année.
Mais cette année 2010 au Chili, ce ne sera pas le cas, ni aujourd'hui, ni la semaine prochaine -date reculée de la rentrée scolaire- ni le mois prochain.
La situation reste très perturbée à Santiago ce matin, bien que l'on annonce que tout le réseau métro fonctionne. Sans doute parce que ce métro est récent (commencé en 1972 et dont les ultime lignes ont moins d'un an).
Cette capitale de 5 à 6 millions d'habitants qui souffre habituellement de son gigantisme, de l'anarchie de son développement tant horizontal que vertical, de ses problèmes de transport parce que le système mixte réunit un metro public encore insuffisemment développé à des compagnies de bus privées sous concession.
Cette capitale qui est le reflet du développement rapide et moderne d'un pays au pied d'argile, qui reste encore sous le traumatisme inconscient de la dictature de Augusto Pinochet dont la Constitution court encore, constitution qui a mis en place ce système économique ultralibéral qui a permis à la fois ce développement économique et infrastructurel fort mais qui a permis aussi qu'il ne bénificie qu'à une faible partie de la population. Les inégalités et les discriminations au Chili sont encore criantes
 en 2010.
Nous savons que partout dans le monde, ces mégapoles sont des géants au pieds d'argile en cas de catastrophe naturelle, de cataclysme, d'attentat de grande envergure ou d'épidemie. Car la densité de population, l'absence de production alimentaire et les réseaux ultras densifiés d'eau et d'électricité sont autant de source de problèmes en cas de quelque dysfonctionnement que ce soit.
Il en va donc de même mais en beaucoup plus terrible dans le ville de Concepcion, la plus touchée par les séismes (je mets volontairement au pluriel tant les répliques furent nombreuses et fortes).
Cette nuit, première nuit de couvre feu à Concepcion, 160 personnes furent arrêteés pour ne pas l'avoir respecté ; sans que l'on sache si c'étaient des pilleurs, des parents à la recherche d'un fils, de gens qui onmt tout perdu et qui errent sans but.
Mais c'est un détail dans le chaos qui règne.
Comment apporter à ces gens ce dont ils ont besoin quand on sait pertinemment qu'avant les séisme, une partie de la population n'avait déjà pas grand chose à se mettre sous la dent. Même si l'on dit que Concepcion est la seconde capitale du pays, plus au sud et que c'est une ville riche. Rappelons que les Chiliens vivent à crédit, avec des taux d'endettement très élevés car il n'existe aucun système pour protéger les consommateurs contre le surendettement, au contraire, les établissments de crédit s'acharnent à aider par davantage de crédit encore les plus pauvres, et tout ca pour que ces gens puissent payer leurs études à leurs enfants (l'éducation est payante et chère au Chili) ou pour payer les asurances santé (privée également pour presque tout le monde), ou pour accéder au fameux appartement comme un rêve qu'on leur vend pour pas cher, dans des tours immenses dont on se demande ce qu'elles seront dans 25 ou 30 ans quand ils auront peut-être enfin fini de payer leur crédit. Un prêtre disait justement à propos des défauts de constructions qui ont fait tomber certaines édifices habitationnels récents ce matin " Por unos pesos mas es esta tragedia" ce que l'on pourrait traduire par "Cette tragédie pour quelque pesos de plus"... Mauvaise qualité des matériaux, constructions à l'économie, normes antisismiques non respectées... on ne sait pas, on ne saura pas, il est trop tard.
Du reste faut-il vraiment chercher des responsables ou accpeter la fatalité ?

Le Japon, la Chine et l'Argentine furent les premiers à répondre à l'appel à l'aide internationalle lancée par la Presidenta Bachelet. Merci pour eux.

A lire aujourd'hui le superbe texte (en espagnol) de l'écrivain chilien Antonio Skarmeta dans le journal El Païs d'aujourd'hui :
http://www.elpais.com/articulo/internacional/Llanto/Chile/elpepuint/20100301elpepuint_8/Tes

Je ne vous conseille pas de voir les images sur INternet ou à la télé, car une accumulation d'images de destruction et de chaos détruit aussi insidieusement nos facultés à voir le vrai, à dicerner l'ampleur et les proportions exactes.

Les répliques se poursuivent mais plus espacées, et moins fortes. Mais tout ca est relatif, les gens accumulent la fatigue, le stress et la mélancolie, ils aspirent à la tranquilité, c'est aussi pour cela qu'ils ne veulent pas poser un second genou à terre et veulent plutôt se remettre à vivre.

Mais qu'il est difficile de dormir sur ses deux oreilles après un tel traumatisme. Notre côté animal nois maintient en éveil, notre intuition, notre flair, tous nos sens restent en éveil. Il y va de l'espèce, de la race, de la survivance. Les mères se font tigresses, les hommes se font chasseurs ou constructeurs et, surtout... les enfants rejouent. Ils ont beaucoup pleuré, ils ont beaucoup tremblé mais ils ont appris à maîtrisé leur peur et à oublier. Comme il est salvateur d'oublier. Oublier pour se libérer et trouver le courage, la force et l'envie de reconstruire ce qui fut détruit.

A suivre...

NB : vous pouvez retrouver tous les articles de ce blog sur le thème du terrible tremblement de terre du 27 février 2010 dans la nouvelle catégorie "Terremoto 2010" créée pour l'occasion :  
http://bertrand-bertrand.over-blog.com/categorie-11397731.html

Comments

[brigetoun]

je diffuse tes envois sur Facebook j'espère qu'ils seront lus