C'est combien ?
Hier, je faisais les courses dans un supermarché (honte à moi), dans celui où j’ai l’habitude d’aller pour acheter ces produits que l’on ne trouve nulle part ailleurs…
A l’étage, je restais un moment devant le rayon rachitique du café.
Il faut savoir que jusqu’il y a peu de temps, n’existait au Chili que le Nescafé, parce que Nestlé avait eu l’intelligence d’acheter tout le café alentours pour le transformer en poudre et faire plus d’argent avec du café soluble qu’il pourrait n’en faire avec du café en grains ou moulu… Le Chili redécouvre depuis peu de temps le plaisir du vrai café, en partie grâce aux touristes ou aux investisseurs étrangers qui s’installent dans le pays et ne supportent pas de boire de la merde que Nestlé ose appeler "café"… sous prétexte que c’est fait avec du café… Mais, que je sache, le bois en poudre, on appelle ça de la sciure…
Donc le choix est restreint, c’est frustrant pour un bobo qui a vécu dix ans à Paris sans jamais aller au Moulin rouge
Clic can can ?
Me passe devant un femme qui me dit « Hola », me sourit et s’approche de moi pour me faire la bise (et si je dis LA bise, c’est parce qu’au Chili on se fait une seule bise).
Je salue, poli, la dévisage et se passe ce qu’il m’arrive hélas souvent (parce que je ne suis absolument pas physionomiste et si je croise quelqu’un hors contexte, je ne le reconnais pas), je reste interdit et la regardant dans les yeux, je lui avoue, timide, que j’ai du mal à la ressaisir… Elle me sourit et d’une main rajuste son avantageux décolleté et me dit : « Bonita bonita »…
Et là, patatra… je comprends que c’est une femme qui racole, une demi mondaine, une occasionnelle, une victime du monde… en plein jour, entre le rayon café et le rayon biscuit, on pense au boudoir de velours rouge et on reste interdit.
Je l’ai regardée s’éloigner, je l’ai vue aborder de la même manière sympathique et naturelle d’autres hommes qui n’ont pas semblé plus choqué que moi.
Clic ?
Cela m’a rappelait ce qu’un ami m’avait dit tandis que nous sortions ensemble dans un des lieux nocturnes à la mode et pour gens aisés… « fais gaffe Bertrand, ici, tu seras approché ou abordé par des filles et des femmes qui sont en fait des putes, elles seront super gentilles, tu leur paieras le coup, les ramèneras chez toi, mais faudra payer… ».
En parlant avec d’autres, j’ai appris l’existence de femmes qui occasionnellement racolent et couchent pour quelques milliers de pesos pour payer les fins de mois difficiles et qui n’hésitent pas à pleurer en racontant leur vie difficile avec les enfants à nourrir…
En France, cela ne me serait pas arrivé, mais ici, je reste avec mes allures d’étranger et donc avec de l’argent et, qui sait, peut-être des besoins ou des envies d’exotisme, je pourrais être le client idéal, jeune et riche…
Et puis, il y a tous ces « cafés con pierna » (littéralement, café avec jambe) où les serveuses très peu vêtues servent du café au double du prix normal que les clients exclusivement masculins acceptent de payer pour voir un cul ou toucher un nichon en sortant du boulot avant de rentrer à la maison… et je ne parle pas du raccourci à la prostitution cachée qu’offrent ces lieux…
C’est aussi çà le Chili, un pays où la femme, en plus de ne pas être considérée et souffrir du machisme, souffre aussi du sexisme et de l’exploitation sexuelle…
Je ne regrette absolument pas de n’avoir, en dix de vie parisienne, jamais mis les pieds dans un cabaret.