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Invitation au voyage

Viva Michelle !?!?!

16 Janvier 2006 , Rédigé par Bertrand Publié dans #Le voyage de Beltran

De Valparaiso, le 15 janvier 2005
Ne nous affolons pas, cela n’a rien d’historique. Une femme élue à la présidence dans un pays d’Amérique latine, cela s’est produit déjà quatre fois. Certes, pour la première fois au Chili. Mais, Michelle Bachelet (qui n’a absolument aucun lien de parenté avec feu notre chanteur des Corons même si elle a des origines françaises par son père) se présentait sous les couleurs de la coalition politique actuelle (la Concertation démocratique : centre gauche, démocrates chrétiens et socialistes) qui dirige le pays depuis la fin de la dictature, il y a quinze ans. Elle avait tout pour réussir : une femme au caractère bien trempée, médecin pédiatre. Elle fut aussi Ministre de la santé puis, Ministre des armées (alors que son père général est mort sous la torture dans une prison de Pinochet, tandis que sa mère et elle, également torturées, en réchappaient). Elle incarne à elle seule l’histoire des quarante dernières années de ce pays et avait donc tout le pedigree nécessaire pour parvenir tout en haut, dans le Chili moderne d’aujourd’hui… Même ce qui aurait pu apparaître comme des handicaps dans son profil, comme le fait de vivre seule séparée de son mari dans un pays ou le divorce vient juste d’être reconnu et l’avortement encore illégal, d’agir en femme libérée dans un pays machiste où la violence conjugale est un fléau, de se déclarer agnostique dans un pays encore très catholique où seul compte le mariage à l’église ; ces handicaps se sont révélés des gages d’indépendance et de modernité pour un Chili qui aspire à se libérer des jougs traditionnels de la dictature que furent l’Eglise et l’Armée et à se décomplexer vis-à-vis du reste du monde qui continue à lui demander des comptes sur Pinochet.
[Concernant la religion, rectificatif du mois d’avril 2006. Bachelet a convié tout son gouvernement à une messe spéciale, semble-t-il, chez les évangélistes…]
Mais, le Chili, coincé entre l’océan Pacifique et la Cordillère des Andes est comme une île. Donc, retenons de ces élections chiliennes, les résultats des deux votes, ce que les Chiliens ont exprimé pour eux-mêmes. D’abord, les Chiliens votent en masse (le jour des élections, il est impossible d’acheter la moindre goutte d’alcool, les cafés et restaurants sont fermés, le rayon alcool des magasins est bouclé). C’est par un vote que les Chiliens avaient dit « non » à Pinochet, leur dictateur qui avait fait l’erreur de croire qu’ils n’oseraient pas lui dire « non » lors d’un référendum, après 23 ans de « dévouement ». Le dictateur ne pouvait que respecter ces résultats et le Chili opéra donc une transition démocratique douce et progressive. Les élections de ce jour témoignent de la réussite de cette transition, à l’instar des nouvelles casseroles judiciaires que la Justice parvient à accrocher à la patte que le vieux dictateur traîne derrière lui. Cela s’était révélé lors des résultats du premier tour de ces élections puisque le candidat de la droite qui allait se retrouver au second tour ne fut pas celui que les sondages avaient prédit (Lavin, de droite pas vraiment anti-Pinochet), mais bel et bien un anti-Pinochet : Piñera, riche industriel, homme d’affaires et homme politique, incarnant le nouveau Chili, jeune moderne et riche.
Agés de 52 et 54 ans, les finalistes, Bachelet et Piñera, nous apparaîtraient bien jeunes à nous Français (souvenons-nous de la dernière finale électorale avec les dinosaures Chirac et Le Pen).
Les Chiliens ont donc confirmé qu’ils entendaient oublier la dictature, rester relativement à gauche et poursuivre dans la même voie que celle prise depuis la fin de la dictature.
Mais ne nous y trompons pas, le Chili est certes un pays qui fonctionne et qui se développe actuellement très vite, affichant des taux de croissance dignes des dragons asiatiques. Mais, hélas, ici nous sommes en Amérique latine, donc le partage des richesses, des bénéfices et des dividendes est loin d’être égalitaire. Le Chili est en train de devenir un pays riche, dans les statistiques, il demeure un pays pauvre dans la réalité. De tradition libérale, le pays fonctionne avec le secteur privé, rares sont les secteurs publics que Pinochet a soigneusement détruits durant son règne. Il n’y a quasiment pas de retraite, les soins de santé sont prohibitifs pour la majorité des Chiliens qui travaillent 45 heures par semaine, pour deux semaines de congés payés, pour des salaires peu élevés qu’ils reversent, pour leurs enfants, dans un secteur éducatif privé et également hors de prix.
La difficile tâche de Bachelet sera donc à la fois de poursuivre la politique de ses prédécesseurs, sans lasser mais en innovant. Il semblent que les Chiliens attendent beaucoup d’elle, car ils mesurent les changements du pays, ils voient les nouveaux ponts, les nouvelles routes, les nouveau immeubles modernes de bureaux, ils voient la courbe du cuivre (40% du PIB) qui enrichit le Chili comme celle du pétrole enrichit le Venezuela ou la Norvège... Ils voudraient donc eux aussi en profiter, mais ils voient aussi leurs voisins argentins qui ont, trois ans plus tôt, subi de plein fouet les effets néfastes de la mondialisation financière.
Bachelet sera également attendue sur les actes concrets de sa politique (salaire, droit du travail, distribution des richesses, droit à l’avortement, droit des femmes…), mais il n’est pas sûr qu’elle puisse faire tout ce qu’elle a promis durant la campagne, car c’est une coalition hétérogène qu’elle dirigera. Son travail sera aussi de conserver la confiance des investisseurs internationaux (la France est très bien placée) et de faire des investissements solides et durables, afin d’éviter qu’une certaine bulle spéculative ne se forme et prenne le risque d’éclater. Un vrai travail d’équilibriste qui dépend aussi de l’évolution du prix du cuivre (16% du PIB) sur le marché international.
Enfin, avec son élection et la confirmation d’un Chili piloté à gauche, le front de gauche sur le continent latino américain se renforce et prend davantage de poids. Aux côtés de Hugo Chavez et son pétrole, Evo Morales et les cocaleros indiens de Bolivie, Lula et la puissance démographique du Brésil et Fidel Castro l’épine dans le pied de Bush, Michelle Bachelet rajoute un pays au très fort potentiel de développement économique et industriel.

Et pour la suite, rendez-vous le 21 de Mayo !

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P
Te reconvertirais-tu dans le journalisme ? merci pour cet article très intéressant.
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P
L'Europe a bien compté à une époque un large majorité de gouvernements social-démocrates, mais le "front de gauche" ne s'est pas concrétisé... Pourquoi les conditions pour cela seraient-elles plus favorables en Amérique latine ? la proximité du géant US, peut être...
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T
 , ,,,"se  ne sont "  no  ,!!"ce ne sont "  puisqu'il est question d' orto grafe
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P
Je viens soutenir Bertrand. Pas sur l'article car il se défend tout seul. Sur les fautes d'orthographe, je sais d'une part qu'il a écrit l'article dans l'urgence ( pour répondre à la demande de français pressés de savoir comment ce dimanche s'est passé du côté de Valparaiso, mais surtout, je sais, que lorsque l'on écrit dans les "cybercafés", se ne sont pas les conditions idéales pour faire un travail parfait.Bertrand acceptes-tu que je propose ton article sur le site Agoravox. ( en gardant ta signature ). Je crois qu'il y a parfaitement sa place. Si tu es d'accord, je demanderai à Word de revoir les problèmes d'orthographe.
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Y
Ca ferait un bon article de presse si tu faisais moins de fautes ! Lamentable là beltran !! tssss Ceci dit cette élection était espérée et attendue mais j'ai peur qu'elle ne puisse pas faire grand chose avec un gouvernement aussi hétéroclite.... Je lui fais confiance cependant sur ses projets concernant les femmes car elle a l'air tenace et elle ne repartira pas sans faire passer des lois antisexistes et progressistes. Sur le plan économique ... là franchement elle ou un autre .... le Chili même dizque desarrollado demeure sous la même coupe que tous les autres pays d'Amérique latine (même Chavez n'y parvient pas ... et pourtant ...)Je suppose que tu vis de savoureux moments avec les électeurs victorieux (ça me rappelle le jour de mes 16 ans ... chez nous ....)Bises tit Che Viva Michele !!!(PS c'est bon  suis remise à peu près sur pieds )
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